La présidence irlandaise de l'Union Européenneen 2004 : une épreuve de taille
Marie-Claire
Considère-Charon Professeur à l'Université de Franche-Comté
Introduction C’est
à l’initiative du président français Giscard d’Estaing que les chefs
d’Etat et de gouvernement se réunirent pour la première fois en 1974 en
conseil, accompagnés des Ministres des Affaires Etrangères. Le Conseil Européen
qui n’a pas été prévu par le Traité de Rome est en quelque sorte une
institution dérivée, qui apparaît souvent comme l’instance politique suprême
de l’Union Européenne. Depuis 1974 les chefs d’Etat ou de gouvernement se
retrouvent deux fois par an au moins lors du Conseil Européen ou « sommet
européen ». Le président de la Commission y participe également. Le
président du parlement européen est invité à faire un exposé lors de la séance
d’ouverture.
Ces sommets européens qui rassemblent les chefs d'Etat et de gouvernement ont
eu une gestation difficile dans la mesure où ils s'intègrent dans une
dimension intergouvernementale qui est diversement perçue par les
Etats-membres. En effet le Conseil Européen dont la qualification juridique
reste toujours incertaine est en général moins bien perçu par les petits
Etats comme la Belgique, les Pays-Bas et l'Irlande, car à leurs yeux il édulcore
en quelque sorte le rôle de la Commission jugée plus protectrice de leurs
intérêts. Toutefois il offre la possibilité à de petits Etats de pouvoir
s'affirmer comme des partenaires à part entière en prenant pour six mois les
rênes de l'Union.
En théorie le Conseil Européen est une institution unique; en pratique il
s’agit d’une somme de vingt-trois conseils des ministres correspondant à
chacun des domaines ministériels des Etats membres, agriculture, finance,
environnement, éducation, affaires étrangères, justice etc… On
peut dès lors parler, à l’instar de Michel Simion, d’une "inflation
sectorielle". En vertu de l’article D du Traité de Maastricht son
domaine de compétence est illimité : « Le Conseil Européen donne
à l’Union les impulsions nécessaires à son développement et en définit
les orientations générales ». Le Conseil Européen a ainsi pris de
plus en plus d’importance au sein de l’Union en fixant les priorités, en
donnant l’orientation politique à suivre, en stimulant le développement et
en réglant les questions litigieuses que n’a pu résoudre le Conseil de
Ministres. Le Conseil Européen présente un rapport au Parlement Européen
après chacune de ses réunions et lui dresse chaque année un état sur les
progrès de l’Union.
Les Conseils Européens qui rythment l'activité européenne sont en quelque
sorte des grandes messes semestrielles qui représentent le temps fort de
chaque présidence. La complexité des problèmes fait qu’en réalité le
Conseil sert en quelque sorte de chambre d’enregistrement dans la mesure où
la grande majorité des décisions sont prises au préalable par le Conseil
des Représentants Permanents-le COREPER- qui n’est en théorie qu’un
organe technique. Il est composé des représentants permanents des Etats
membres avec prérogatives d’ambassadeurs et siège à Bruxelles.
Un autre problème fonctionnel est lié au caractère confidentiel des
Conseils Européens qui se déroulent à huis clos et aggravent le sentiment
de bureaucratie européenne tant dénoncé. La prise de décision à la
majorité qualifiée ou à l’unanimité reste au cœur du débat. Le
compromis de Luxembourg est toujours invoqué lorsque les Etats estiment que
leurs intérêts vitaux sont en jeu. La France le fit en 1993 à l’occasion
des négociations agricoles du GATT. Mais plutôt que de recourir au vote et
d'isoler certains états, le Conseil préfère rechercher des compromis
minimalistes dans de nombreux domaines ce qui en réalité empêche de véritables
avancées. Toute fois ces compromis ont le mérite d’éviter la crise voire
la rupture entre les Etats. Les présidences
irlandaises : des bilans positifs
L'Irlande a depuis son adhésion tenu cinq fois la présidence du Conseil : le
1er semestre 1975, le 2ème semestre 1979, le 2ème semestre 1984, le
1er semestre 1990 et enfin le 2ème semestre 1996. A chaque fois, les
commentaires des autres Etats-membres ont été favorables, et l'Irlande a
acquis la réputation d'une grande efficacité, notamment par sa faculté à
atteindre des compromis, ce qui révèle son côté pragmatique. Il est
d'ailleurs souvent plus facile pour un petit Etat d'apporter sa contribution
lors de ses présidences car il a une plus grande faculté à atteindre des
consensus. En effet, les grands Etats peuvent leur faire confiance car ils
savent qu'ils n'ont pas d'intérêt et d'ambition personnels importants à défendre
et que leurs propositions ne cachent aucune manoeuvre. Ceci est particulièrement
vrai pour l'Irlande du fait de sa non appartenance à une alliance militaire
et de sa neutralité mais cela peut-être également source de malaise lorsque
un enjeu en matière de défense est à définir.
Ce pragmatisme l'Irlande en avait fait la preuve dès août 1949 lors de la
première session de l'Assemblée Consultative. La question de la nature de
l'union européenne se posait alors et deux thèses s'affrontaient, celle des
Fédéralistes qui se recrutaient parmi les Continentaux -Français, Italiens,
Belges, Hollandais qui souhaitaient une Europe supra nationale et celle des
"fonctionnalistes" incarnés essentiellement par les Britanniques et
les Scandinaves qui jugeaient qu'une Europe intergouvernementale suffirait.
Malgré les divergences profondes l'Assemblée était parvenue à adopter une
résolution à l'unanimité qui stipulait que le Conseil de l'Europe serait
l'institution d'une autorité politique européenne dotée de fonctions limitées
mais de pouvoirs réels. Cet
accord qui préfigurait le principe des coopérations renforcées avait vu le
jour grâce à l'intervention de De Valera, alors premier ministre de
l'Irlande qui avait suggéré au cours du débat : Si
les nations du continent ne pensent pas pouvoir nous attendre, peut-être
devraient elles envisager d'aller plus avant sans nous, en concluant entre
elles un accord réalisant une union plus étroite.
En 1975 alors qu'elle n'était membre que depuis deux ans la présidence revêtait
pour l'Irlande une importance particulière : c'était d'une part la concrétisation
de ce qu'elle avait attendu depuis longtemps, c'est-à-dire un rôle de
premier plan et indépendant dans les affaires européennes; symboliquement,
cette présidence du Conseil permettait à l'Irlande de se placer pour la
première fois "devant" le Royaume Uni pendant six mois. D'autre
part il lui était primordial de réussir ce premier test vis-à-vis de ses
partenaires européens pour acquérir une certaine crédibilité et un certain
respect. L'Irlande a relevé ce défi en faisant progresser la Communauté sur
un certain nombre de dossiers : -elle
a mené à bien les négociations qui ont conduit à la signature de la première
Convention de Lomé avec quarante six pays d'Afrique, des Caraïbes et du
Pacifique. -elle
a débloqué par deux fois les négociations en cours entre la Communauté et
les pays arabes. -elle
a permis un "atterrissage en douceur" pour la conférence Nord-Sud
à Paris alors qu'un accord ne pouvait être obtenu entre les participants sur
certaines questions -elle
a établi des bases pour une relation positive entre la CEE et le Portugal
pour l'aider notamment dans sa transition vers la démocratie -elle
a introduit le vote à la majorité au Conseil des Ministres des affaires étrangères
(pratique non appliquée par les présidences suivantes) -elle
a été à l'origine des consultations de coopération politique entre la
Communauté Européenne et les Etats-Unis. -elle
a négocié au nom du Conseil des Ministres une nouvelle procédure budgétaire
avec le Parlement Européen. Une image
constructive La situation de l’Irlande et sa petite taille lui imposent un principe stratégique fondamental : ne pas se laisser marginaliser et défendre ses intérêts tout en cultivant une image positive au sein de la Communauté. S’il est impératif pour un petit Etat de défendre ses positions, il l’est tout autant de ne pas bloquer le processus de décision. Cet impératif est d'autant plus fort, depuis le blocage dû au rejet du traité de Nice par l'électorat irlandais en 2001 et incite l'Irlande à tout mettre en œuvre pour redorer son image. Ces préoccupations se sont exprimées par la voix du Ministre des Affaires Etrangères Brian Cowen qui, lors du forum national sur l'Europe en juillet 2003, a réaffirmé que si l'Irlande était déterminée à protéger ses intérêts nationaux légitimes, elle partageait avec ses partenaires un grand intérêt commun et le souhait de contribuer à la mise en place d'une Union dynamique et efficace. Il ajoutait : Il
n'existe pas de divergence entre les intérêts de l'Irlande et l'intérêt général
de l'Europe; bien au contraire, c'est au sein de l'Europe que nous avons
grandi et que nous nous sommes développé, et c'est au sein de l'Europe que
nous continuerons à progresser.
L'Irlande, depuis son entrée dans la Communauté a tout mis en œuvre
pour se forger dès le départ une image constructive et une réputation
d'efficacité et d'utilité pour la Communauté Européenne. Par une
participation active aux différentes institutions de la Communauté Européenne,
par des positions divergentes de celles du Royaume-Uni sur certains points,
par une attitude proeuropéenne sans aucune ambiguïté et par une
contribution efficace aux progrès de l'intégration européenne lors de ses
présidences du Conseil, l'Irlande s'est imposée comme un Etat membre à part
entière et a affirmé sa spécificité par rapport au Royaume-Uni.
Sa dernière présidence durant les six derniers mois de l'année 1996 a
confirmé cette image. L'Irlande a réussi à faire avancer l'Union Européenne
sur des questions parfois délicates telles que la mise en place d'une action
coordonnée en matière de trafic de drogue et la préparation d'un programme
contre le crime organisé, l'instauration avec l'aide du Luxembourg du
pacte de stabilité pour l'Union Economique et monétaire (UEM) sans oublier
la Déclaration de Dublin sur l'Emploi, programme commun pour combattre le chômage. La présidence
de 2004 : un nouveau défi
L'étendue et la lourdeur de la tache de cette sixième présidence n'échappe
pas au gouvernement qui s'y prépare activement, d'autant que l'Irlande en
attend beaucoup en terme d'image et de reconnaissance. Les personnalités
concernées au premier chef sont, outre le premier ministre Bertie Ahern, les
ministres des Affaires Etrangères, de la justice et des finances. Sur les
mille réunions prévues au niveau communautaire, cent auront lieu en Irlande.
Quant aux deux sommets européens ils auront lieu à Bruxelles et non à
Dublin suite à la décision de ne plus réunir ces sommets dans les pays qui
assument la présidence tournante. A partir de mai 2004 les représentants des
dix nouveaux membres rejoindront leurs homologues des quinze. L'Irlande devra
alors assumer un rôle de coordonnateur qui promet d'être encore plus
difficile quand on passe de 15 à 25. Il importe de souligner que compte tenu
de l'élargissement et du nombre important de petits Etats cela pourrait être
la dernière fois que le gouvernement de Dublin exerce une telle responsabilité.
Le premier ministre Bertie Ahern a enjoint les membres du gouvernement à
incorporer une cinquantaine de directives communautaires[1] avant le 1er
janvier 2004. En matière de droit communautaire l'Irlande ne se montre pas très
empressée à mettre en place les dispositions juridiques pour se
conformer aux directives communautaires et dans ce domaine apparaît
comme un mauvais élève, au même titre que l'Italie qui détient la lanterne
rouge. Toutefois des efforts ont été faits depuis le début de l'année 2003
qui ont permis d'incorporer déjà une cinquantaine de directives. Il s'agit
d'apparaître irréprochable si l'on veut faire figure de "bon
communautaire".
L'ordre du jour s'avère extrêmement chargé dans un contexte international
difficile et instable. La grande inconnue réside dans l'aboutissement des négociations
sur la constitution européenne qui est actuellement débattue sous la présidence
italienne. Si les négociations n'aboutissent pas l'Irlande devra prendre le
relais.
Le hasard du calendrier a décidé qu'il lui incomberait également
d'accueillir au 1er mai 2004 les dix nouveaux Etats-membres. Parmi les
dix pays qui vont rejoindre l'Union Européenne en 2004 figurent quatre pays
d'Europe centrale qui étaient naguère partie intégrante de l'ancien bloc
communiste -la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie et la République tchèque,
la Slovénie qui faisait partie de la Yougoslavie de Tito, les trois républiques
baltes – la Lettonie, la Lituanie et l'Estonie, et enfin les deux îles
méditerranéennes –Chypre et Malte, anciens territoires britanniques. On
les désigne sous le nom de 'pays adhérents'[2]. Ces Etats sont bien disposés
à l'égard de l'Irlande dont l'expérience communautaire peut les encourager
sur la voie de la modernisation. Ils sont conscients de ce qu'ils peuvent
apprendre au contact des autorités irlandaises. L'Irlande devra également
poursuivre les négociations d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie et
continuer les pourparlers avec la Turquie sur une éventuelle ouverture des négociations.
Elle entend également soutenir la candidature de la Bosnie tout en insistant
sur les prérequis à toute adhésion dans le domaine politique et économique.
Le gouvernement s'engage aussi à promouvoir le rôle de l'Union en tant
qu'organe cohérent dans les affaires internationales. Le conflit au
Moyen –Orient, l'Iran, l'Irak, le développement en Afrique, les relations
avec la Russie et les nouveaux voisins de l'Union seront à l'ordre du jour.
Le sommet européen de printemps donnera à l'Irlande l'occasion d'affirmer
ses options en matière de développement. Ce sommet sera en effet consacré
à l'examen de l'agenda de Lisbonne qui a prévu de doter l'Union de l'économie
la plus compétitive au monde d'ici 2014. Une raison de plus pour le
gouvernement irlandais de mettre le chapitre économique et social au cœur de
ses priorités et de donner une impulsion nouvelle au processus de développement
durable en promouvant des initiatives dans divers domaines tels que la
recherche et le développement, l'emploi, les réformes structurelles, la
promotion des PME , le respect de l'environnement et l'amélioration des
infrastructures. L'Irlande devra s'employer à encourager la reprise à l'échelle
communautaire et à assurer la remontée de la conjoncture en mettant l'accent
sur le cadre de travail des entreprises du vieux continent. Le message à l'égard
des nouveaux sera certainement de lutter contre un taux de chômage élevé,
faire monter la croissance et engager les réformes économiques et sociales
qui s'imposent. L'Irlande tient par ailleurs à ce qu'un certain nombre de questions soient réexaminées à l'occasion de sa présidence. Ces questions portent sur la politique étrangère et de défense commune ainsi que sur la procédure de vote en matière de justice et de criminalité. Elle fait partie du groupe de pays qui ne sont pas très favorables à l'idée de voir le Conseil décider à la majorité qualifiée de l'opportunité d'une "coopération structurée"[3]. Tout comme les Pays-Bas et la Finlande, elle souhaite d'autres garanties comme la fixation d'un seuil minimum de pays appelés à constituer une avant-garde dans le domaine de la défense. Elle peut compter sur de nouveaux alliés de l'Europe de l'est, en particulier la Pologne qui partagent son avis à ce sujet. La vocation militaire de la nouvelle structure de défense ou "capacité de planification et de conduite d'opération" va à l'encontre du principe de neutralité auquel l'Irlande reste très attachée tout comme l'Autriche, la Finlande et la Suède et peut-être Malte parmi les nouveaux arrivants. Toutefois la pression en faveur d’une défense européenne est de plus en plus forte et l'Irlande ne tient pas à obtenir une clause de non participation (opting out) qui remettrait en cause son engagement en faveur d'une Europe solidaire. A cela s'ajoutent des raisons pragmatiques qui avaient déjà prévalu lors de l'adhésion au Partenariat pour la Paix le 1er décembre 1999. Un défaut de participation signifierait aujourd'hui un renoncement à une dimension importante de la politique étrangère de l’Europe et un risque de marginalisation. L'Irlande devra alors obtenir une modification du texte qui tienne compte de la spécificité des Etats neutres. Compte
tenu des problèmes liés au respect du pacte de stabilité et de croissance
par les deux poids lourds de l'Union, l'Irlande dont le ministre des Finances
avait lui même été rappelé à l'ordre par Bruxelles en 2001 se
montrera favorable à une application souple de ce pacte tout en continuant
d'en préconiser le maintien. Compte tenu de ses infrastructures qui restent
encore à améliorer l'Irlande n'entend pas être contrainte à comprimer ses
dépenses d'équipement. Les autorités irlandaises entendent également que
les décisions en matière de fiscalité soient toujours prises à l'unanimité; Une occasion
à saisir Il
est vrai que cette présidence arrive à point nommé au moment où l'économie
irlandaise s'essouffle et que le tigre celtique a marqué le pas. Si les
signes de reprise de l'activité venue d'outre atlantique sont très
encourageants, il reste à prouver que l'Irlande puisse emboîter le pas du géant
américain. En attendant les secours du grand large, l'Irlande devrait
profiter de l'occasion présidentielle en termes de contrats. Les sociétés
irlandaises qui sont invitées à sponsoriser les manifestations liées à la
présidence misent sur des contrats comme celui attribué à Esat BT, filiale
de l'opérateur britannique pour concevoir et mettre en place le site web de
la présidence. Il
va sans dire que les secteurs de l'hôtellerie, la restauration et le tourisme
seront les grands bénéficiaires, non seulement à Dublin mais aussi dans des
petites villes pittoresques comme la charmante ville de Killarney qui
accueillera du 9 au 11 mai 2004 les 25 ministres de l'agriculture de l'Union
élargie pour un conseil informel.
Les échanges commerciaux entre l'Irlande et les nouveaux Etats-membres sont
assez limités et l'Irlande entend bien également profiter de sa présidence
pour les développer comme l'a fait savoir Brian Cowen ministre des affaires
étrangères à tous les ambassadeurs auprès de ces pays : "C'est une
occasion formidable pour l'Irlande d'utiliser sa présidence comme le moyen de
gagner du terrain dans cette zone". Afin de prospecter les nouveaux
marchés de ces pays émergents Enterprise Ireland, l’agence de
promotion des entreprises autochtones, y compris à l’étranger, a accompagné
un certain nombre compagnies irlandaises en République tchèque, Hongrie et
Pologne ainsi que dans une moindre mesure en Slovaquie et en Roumanie. Mais à
l'exception d'Allied Irish Bank qui emploie 11000 salariés en Pologne, la
conquête de ces nouveaux marchés par les sociétés irlandaises reste à
faire. Conclusion La présidence tournante de l'Union Européenne donne l'occasion de faire le point sur les progrès réalisés, de redéfinir les objectifs et d'insuffler un nouveau dynamisme dans des domaines qui restent à construire ou à consolider. Les Conseils Européens sont des temps forts de l'histoire communautaire et les petits Etats qui en assurent la présidence y trouvent une occasion de valoriser leur rôle au sein de l'Union tout en apportant leur touche personnelle et leurs compétences. Il leur importe d’afficher des options claires et fermes dans certains domaines pour s’affirmer comme des partenaires à part entière. S'ils gèrent souvent mieux la présidence que les plus grands, ils doivent relever des défis, tant dans le domaine de l'organisation que de la négociation. Les taches qui attendent l'Irlande en 2004 sont nombreuses et délicates. Réservée dans le domaine de la défense commune, l'Irlande compte donner une vigueur nouvelle au fameux processus de Lisbonne en insistant sur la nécessité d'un développement durable qui implique l'entente de tous les partenaires sociaux comme le souligne son ministre des Affaires Européennes Dick Roche. Dans le domaine politique elle s’efforcera d’apparaître comme un arbitre de talent disposé à démêler des situations difficiles ou même des crises[4]. La
présidence irlandaise de 2004 sera incontestablement un moment historique
avec l'entrée officielle de dix nouveaux Etats-membres. L'Irlande devra faire
preuve d’un volontarisme communautaire avec ses nouveaux partenaires en
misant sur la réussite de son parcours communautaire, gage d'une certaine
empathie avec de petits Etats, qui comme elle n'ont pas été épargnés par
les ambitions impérialistes de leurs puissants voisins.
[1] La loi communautaire adoptée par le Conseil ou par le Parlement et le Conseil dans le cadre de la procédure de codécision peut prendre diverses formes qui sont : les règlements qui sont directement applicables sans transcription dans le droit national, les directives qui lient les Etats membres quant aux résultats à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens à utiliser, les décisions qui sont obligatoires en tous leurs éléments pour les destinataires qu’elles désignent. Une décision peut s’appliquer à un ou à tous les Etats membres, à des entreprises ou à des particuliers, et enfin les recommandations et avis qui ne sont pas obligatoires. [2] La Bulgarie et la Roumanie espèrent pouvoir faire de même en 2007, tandis que la Turquie ne négocie pas pour l'instant son adhésion. [3] Un accord a été conclu entre la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne qui aboutirait à la création d'une "capacité de planification" et de conduite d'opération structurée européenne autonome, autrement appelé le "QG européen" ainsi qu'à la mise en place d'une "coopération structurée" qui permettrait à certain pays de se détacher du lot pour aller plus en avant dans le domaine de la défense. [4] C’est pendant les présidences irlandaises que des problèmes britanniques furent réglés comme celui du budget.
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